Art et poésie - Caillebotte et Brassens

Gustave Caillebotte, "Homme et femme sous un parapluie", 1877 (Etude pour Rue de Paris, temps de pluie)
Il pleuvait fort sur la grand-route,
Ell’ cheminait sans parapluie,
J'en avais un, volé, sans doute,
Le matin même à un ami
Courant alors à sa rescousse,
Je lui propose un peu d'abri.
En séchant l'eau de sa frimousse,
D'un air très doux ell’ m'a dit « oui ».
.
Un p’tit coin d’ parapluie,
Contre un coin d’ paradis.
Elle avait quelque chos’ d'un ange,
Un p’tit coin d’ paradis,
Contre un coin d’ parapluie.
Je n’ perdais pas au chang’, pardi !
.
Chemin faisant que ce fut tendre
D'ouïr à deux le chant joli
Que l'eau du ciel faisait entendre
Sur le toit de mon parapluie !
J'aurais voulu comme au déluge,
Voir sans arrêt tomber la pluie,
Pour la garder sous mon refuge,
Quarante jours, quarante nuits.
.
Un p’tit coin d’ parapluie,
Contre un coin d’ paradis.
Elle avait quelque chos’ d'un ange,
Un p’tit coin d’ paradis,
Contre un coin d’ parapluie.
Je n’ perdais pas au chang’, pardi !
.
Mais bêtement, même en orage,
Les routes vont vers des pays ;
Bientôt le sien fit un barrage
A l'horizon de ma folie !
Il a fallu qu'elle me quitte
Après m'avoir dit grand merci.
Et je l'ai vu’, toute petite,
Partir gaiement vers mon oubli…
Georges Brassens
Gustave Caillebotte, "Homme et femme sous un parapluie", 1877 (Etude pour Rue de Paris, temps de pluie).
Gustave Caillebotte, "Homme et femme sous un parapluie", 1877 (Etude pour Rue de Paris, temps de pluie).