.Bonnard - Partie 1

Peinture de Pierre Bonnard de 1940, "L'escalier du Jardin".
Pendant longtemps, il n'était pas de bon ton d'aimer les œuvres ultra colorées de Pierre Bonnard (1867-1947). A 24 ans Bonnard disait d'être d'aucune école, et construisait son œuvre hors des grands courants. Certes, il s'est rallié un temps aux Nabis ("prophètes" en hébreu), un mouvement qui cherchait à recréer une forme d'art sacré avec des toiles très colorées et presque abstraites. Mais ce fut pour mieux s'isoler par la suite. Géographiquement d'abord : Pierre Bonnard réalise l'essentiel de ses peintures en Normandie, puis au Cannet, sur la Côte d'Azur, loin de l'agitation parisienne.
Artistiquement, ensuite : il est passé à côté des grandes révolutions de son temps, le cubisme, le surréalisme… provoquant le dédain de quelques contemporains, comme Picasso qui eut des mots particulièrement durs contre les "sensibleries" de Bonnard.
J'ai compris très tardivement ce que clamait mon grand-père qui considérait Bonnard comme de maître absolu du XXe siècle.

 

Pierre Bonnard, en novembre 1889, prête serment d'avocat. Quel cheminement ! Matisse, lui était clerc de notaire.
Le voici avec son teckel adoré. Il en eut plusieurs : Ubu, Black, Poussette et Dingo, on les retrouve dans nombre de ses toiles.
Bonnard est le premier artiste qui ait cru en mon grand-père, Aimé Maeght.
Aimé Maeght disait, "Sans Bonnard, j'aurais peut-être continué comme les autres marchands. Bonnard est arrivé au moment dans ma vie où je voulais faire ce grand saut vers l'art moderne et c'est lui, d'abord par sa peinture et par les nombreuses réflexions et les nombreuses discussions que nous avons eues ensemble, qui m'a fait comprendre ce que pouvait être l'art moderne." Conscient de côtoyer un homme d'exception, mon grand-père l'a filmé dans son quotidien, réalisant ainsi les seuls films au monde de ce génie de l'histoire de l'art.

"La toilette", vers 1908
Bonnard choisit une composition sophistiquée pour mettre en scène Marthe, sa compagne et modèle exclusif, représentée ici à la fois de dos et de face grâce au reflet du miroir. L'importance du décor ainsi que la présence d'éléments tronqués ou déformés, tels le guéridon sur lequel est posé un broc, poussent la composition vers une abstraction décorative caractéristique de cette période de la création de Bonnard. Retouché par l'artiste entre 1914 et 1921, le tableau s'inscrit dans une période de doute et de remise en question, après la déferlante cubiste, Bonnard reprend les bases de la peinture.
Bonnard ne pouvait s'empêcher de retoucher ses œuvres, se baladant avec une boite de couleurs dans sa poche, y compris dans les musées. Bonnardiser ou bonnarder sont entrés dans le langage courant signifiant retoucher une œuvre d’art qu’on a créée, y compris à l’insu de ses nouveaux propriétaires.

Pierre Bonnard, "Intérieur aux fleurs", 1919.

"La Partie de croquet", 1892.
Chez Bonnard, ce qui est merveilleux et qui trouble notre regard, c'est qu'il n'y a pas de hiérarchie dans les éléments de la composition, notre regard va et vient de l'un a l'autre, le sujet devient accessoire, le propos est la composition. Trouver l'équilibre des valeurs. Cette peinture est un chef-d'œuvre de la période Nabis de Bonnard qui n'hésite pas à inclure des motifs "décoratifs" dans ses compositions faisant fi d'une représentation du réel. Ici les vêtements deviennent prétextes à des inclusions de carreaux et damiers.
Le groupe des Nabis - nabi signifie prophète en hébreu - réunit Paul Sérusier (1864-1927), Pierre Bonnard (1867-1947), Maurice Denis (1870-1943), Henri-Gabriel Ibels (1867-1936), Paul-Elie Ranson (1861-1909), Édouard Vuillard (1868-1940), Félix Vallotton (1865-1925), Mogens Ballin (1872-1914)…
Le soleil de la Côte d'Azur par Pierre Bonnard pour éclairer la semaine, "Fenêtre ouverte", 1921. Éblouissant !
Quelle fantastique composition avec ce store noir qui répond au petit chat et aux verticales… Tout ne semble être qu'un assemblage de formes géométriques qui créent un équilibre parfait. La disposition des éléments qui encadrent l'ouverture de la fenêtre dirigent le regard vers cet arbre voluptueux.
"Femme avec chien", 1891.
En 1890, Pierre Bonnard partage un atelier avec Vuillard et Marice Denis. C'est alors qu'il commence à faire des lithographies en couleurs. L'année suivante, 1891, il rencontre Henri de Toulouse-Lautrec et présente sa première exposition au Salon des Indépendants et dans les premières expositions des Nabis. Il expose avec les Nabis jusqu'à leur dissolution en 1900.
.
D'autres œuvres bientôt publiées.